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Tribune publiée dans le journal Le Monde



La région Centre-Val de Loire a de multiples atouts. Elle a néanmoins un point faible et une anomalie, les deux ayant trait au même sujet vital, celui de la santé. Le point faible : une désertification médicale qui ne cesse de s’amplifier et la classe en dernière position au niveau national, avec seulement 97,9 médecins pour 100 000 habitants, alors que la moyenne en France est de 123,8 médecins.


Pire, le Loiret, l’un des six départements de la région, compte 63,7 médecins pour 100 000 habitants. Ce qui veut dire concrètement qu’aujourd’hui 150 000 habitants du Loiret n’ont pas accès à un médecin traitant.


L’anomalie maintenant : la région n’a sur son territoire qu’une seule faculté de médecine, à Tours, alors que toutes les régions en France en comptent au moins deux. C’est le cas, par exemple, de régions comme la Normandie et la Bourgogne-Franche-Comté, comparables par leur taille à celle du Centre-Val de Loire. Ainsi, Orléans, capitale régionale, n’a pas de CHU, une hérésie contre laquelle les maires successifs de la ville se battent depuis plus de trente ans. Toujours en vain.


Conséquences : la faculté de médecine de Tours forme chaque année 300 médecins, et n’a pas les moyens humains pour en former davantage, alors que les besoins se situent à 500, au minimum, par an. Année après année, le désert médical gagne donc funestement du terrain.

Faut-il se satisfaire de cette situation infernale alors qu’il est question de vie et de mort ? La réponse est non, bien sûr. En tant que maire de la ville, j’ai donc décidé d’agir et de chercher des solutions concrètes. Le 21 janvier, nous avons ainsi signé un accord avec la faculté de médecine publique de Zagreb, la capitale croate. Il prévoit que 50 étudiants français bénéficieront, dès la rentrée de septembre, des cours dispensés par cette faculté de médecine, reconnue pour l’excellence de son cursus et labellisée « high quality ».


En contrepartie d’une bourse allouée aux étudiants en fonction de leurs ressources, ceux-ci s’engageront à travailler au moins cinq ans à Orléans à l’issue de leurs études. Tout le monde y gagne, à commencer par nos concitoyens qui sont dans une grande détresse, qui confine aujourd’hui à la précarité dès qu’il s’agit de santé.


« Nous avons pris nos responsabilités »


La levée de boucliers ne s’est pas fait attendre. Les contre-vérités et les procès d’intention ont immédiatement fleuri. Etudes au rabais, diplômes non reconnus, discipline non enseignée, sélection par l’argent, etc., tout a été écrit pour discréditer ce protocole avant même sa mise en œuvre.


En réalité, qu’avons-nous fait de si grave ? C’est simple : nous avons bousculé les corporatismes universitaires qui, depuis des décennies, monopolisent le débat dans un entre-soi savamment protégé et qui n’apporte en définitive pas la moindre solution. Chacun déplore la situation, la regrette, s’en lamente, mais personne n’agit. Et, crime de lèse-majesté, nous n’avons pas levé le doigt pour demander à tel ou tel doyen de faculté de médecine la permission, sinon l’autorisation, de signer ce partenariat avec Zagreb.


Nous avons pris nos responsabilités, nous avons été innovants, pragmatiques et européens, puisque la situation commande de l’être. Nous n’avons pas le temps de multiplier les tours de table, aussi nombreux que stériles. Nous sommes dans l’action.


Serge Grouard, Maire d'Orléans


En complément, voici l'article du Monde accompagnant ma tribune :



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