Les fêtes johanniques d’Orléans devaient être célébrées dans un documentaire sur une antenne locale de France 3. Le service public s’est rétracté.
On est rarement déçu par les partis pris de France Télévisions ! Le vendredi 12 février, les téléspectateurs de France 3 étaient privés de la rediffusion du téléfilm La Loi de Damien (avec Richard Berry) remplacé par La Loi de Julien (avec Jean-Pierre Darroussin). L'acteur est sous le coup d'une plainte déposée quelques semaines plus tôt par sa fille aînée pour inceste, viols, agressions sexuelles et corruption de mineur. L'enquête est en cours, mais la présomption d'innocence semble s'arrêter aux portes du siège du groupe télévisuel. Pour justifier cette décision, Anne Holmes, la directrice de la fiction du groupe, explique qu'il ne s'agit pas d'infliger une « punition » à l'acteur incriminé, mais de « protéger » « l'ensemble des protagonistes ». Comprenne qui pourra !
Le 14 avril dernier, Sonia Mabrouk, invitée de C à vous sur France 5 pour parler de son dernier livre Insoumission française (éd. de l'Observatoire) publiait sur son compte Facebook ces quelques lignes.
Voilà qui manque singulièrement d'élégance.
Une personnalité connue de la droite identitaire
Le dossier de France Télévisions s'épaissit un peu plus avec l'affaire Jeanne d'Arc. Constatant qu'il ne pourrait pas organiser cette année pour des raisons sanitaires les fêtes johanniques prévues du 29 avril au 8 mai, le maire d'Orléans Serge Grouard décide le 30 mars de réaliser un tournage de tous les temps forts de cette commémoration débutée en 1430.
Dès le lendemain, contact est pris avec la direction de France 3 Centre-Val de Loire qui se montre intéressée. Un producteur et un réalisateur sont choisis. Le 21 avril, Nicolas Ricoud, délégué aux antennes et aux contenus, envoie une lettre à la mairie d'Orléans dans laquelle il écrit : « France 3 Centre-Val de Loire, chaîne du groupe France Télévisions, a l'intention de diffuser sur son antenne linéaire et sur son site Internet france.tv, l'émission de 52 minutes consacrée aux Fêtes de Jeanne d'Arc, produite par Novocorp et réalisée par Dominique Adt. » Plus loin il est même précisé que « les engagements respectifs de Novocorp et de France 3 Centre-Val de Loire feront l'objet d'un contrat de cession de droits passé entre eux, prochainement rédigé et signé ».
Un documentaire trop… « politisé »
Mais six jours plus tard, patatras, le même signataire accompagné de Jean-Jacques Basier, directeur régional de la chaîne, se rétracte. « Plusieurs éléments qui nous sont remontés laissent à penser que ce programme sera un produit trop politisé. Dans un premier temps, vous avez songé à faire commenter ce magazine par une personnalité connue de la droite identitaire. »
Un véritable acte de censure qui met Serge Grouard, maire d'Orléans, en colère. « Cette personnalité connue de la droite identitaire n'est autre que Charlotte d'Ornellas, journaliste à Valeurs actuelles et CNews, née à Orléans et qui en 2002, à 16 ans, fut choisie pour figurer Jeanne d'Arc lors des fêtes johanniques de la ville. Elle est l'une des trois voix off du documentaire. » Et le maire de préciser que les trois séquences filmées qui nourriront le documentaire sont « la remise de l'épée, la transmission de l'étendard et la restitution de l'étendard de Jeanne d'Arc, des scènes historiques qui n'ont aucune connotation politique ».
Une volte-face sans explication
Les explications avancées par le service public sont d'autant moins convaincantes que, selon le maire d'Orléans, France 3 avait un droit de regard important sur le montage et la version définitive du documentaire. « On était évidemment d'accord pour procéder à des modifications après visionnage du documentaire, révèle-t-il. Arguer des valeurs du service public ou se souvenir que la campagne officielle des élections régionales et départementales débute quelques jours après la diffusion me semble des justifications bien fumeuses », conclut-il.
Selon nos informations, cette marche arrière de l'antenne locale de France 3 a été imposée en « très haut lieu » à Paris. Un oukase qui vient pourtant contredire un e-mail du 21 avril qui annonçait « l'accord de l'antenne nationale de France 3 pour décrocher régionalement sur l'antenne de France 3 Centre-Val de Loire pour diffuser ce programme ». Une volte-face qui ressemble à une censure.
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